Éducation civique

Dans les années 2020, l’éducation civique continue de se développer et s’adapte aux défis contemporains, en visant tant la jeunesse scolarisée que l’ensemble des citoyens.

En Fédération Wallonie-Bruxelles, le Pacte d’excellence entre en phase de concrétisation : à partir de 2020, un nouveau tronc commun est progressivement implémenté de la maternelle à la 3e secondaire, avec un accent fort sur la citoyenneté et le vivre-ensemble.

Le cours de philosophie et citoyenneté (CPC) est étendu à deux heures hebdomadaires pour tous les élèves du secondaire à l’horizon 2023, supprimant définitivement la seconde heure de religion dans les écoles officielles.

Ce cours rénové aborde, outre les institutions belges et les droits fondamentaux, des thématiques comme la démocratie numérique, la transition écologique, l’égalité des genres, la lutte contre les discours de haine – reflétant les enjeux du 21e siècle dans la formation civique.

En Flandre, bien que les cours de religion subsistent, l’attention à la citoyenneté est renforcée par divers moyens : depuis 2021, les écoles sont évaluées aussi sur leur capacité à développer les compétences civiques des élèves (capacité à coopérer, à réfléchir de manière critique, à respecter la diversité, etc.), et le réseau officiel GO! a introduit des modules interconvictionnels où des titulaires de cours de religions différentes co-enseignent pendant quelques heures ensemble la tolérance et le dialogue entre croyances – initiative unique favorisant une forme d’éducation civique pluraliste.

En parallèle, les parcours d’intégration civique pour les primo-arrivants, désormais obligatoires dans tout le pays (Bruxelles a rendu son parcours d’accueil obligatoire en 2022, après la Wallonie en 2016 et la Flandre dès 2003), forment chaque année plusieurs milliers de nouveaux résidents aux valeurs et règles de la société belge.

Ces cours d’orientation sociale incluent une présentation détaillée du système politique belge, des droits et devoirs des citoyens et des services publics, si bien que certains migrants acquièrent une connaissance civique très solide – au point que, comme le remarque une formatrice, « il arrive que l’on maîtrise plus d’informations [sur la Belgique] que ce que les Belges ne connaissent eux-mêmes ».

Enfin, l’éducation civique sort des salles de classe pour toucher la société au sens large : multiplication des campagnes de sensibilisation (élections 2019 : campagne j’ose le vote pour encourager les jeunes à voter pour la première fois), formations citoyennes pour adultes via des organisations d’éducation permanente, et utilisation de jeux sérieux et d’applications (comme Vote&Vous ou Parlementarium à Bruxelles) pour simuler de façon ludique le processus démocratique.

Les années 2020 confirment ainsi la volonté de faire de chaque citoyen – élève, nouvel arrivant ou simple votant – un acteur éclairé de la démocratie, conscient de ses droits et responsabilités dans un État de droit multiculturel.

Justice sociale

La décennie 2020 est profondément marquée par la pandémie de Covid-19, qui met à l’épreuve la robustesse de la justice sociale en Belgique tout en soulignant l’importance de la solidarité.

Dès mars 2020, l’État active pleinement les mécanismes de la sécurité sociale pour protéger les citoyens : mise en place du chômage temporaire « Covid » à large échelle (jusqu’à un million de travailleurs concernés au plus fort de la crise) afin d’éviter des licenciements massifs, octroi d’un droit passerelle pour les indépendants forcés d’interrompre leur activité, moratoires sur les crédits et allocations de compensation pour les personnes précarisées.

Ces mesures d’urgence, financées par un effort budgétaire exceptionnel, ont permis de maintenir le taux de pauvreté quasiment au même niveau qu’avant la crise – illustrant le rôle de filet de sécurité de l’État providence belge.

La campagne de vaccination, gratuite pour tous, a également reflété le principe d’égalité d’accès aux soins. Cependant, la pandémie a aussi mis en lumière des inégalités structurelles : les travailleurs de première ligne (soignants, caissières, livreurs) souvent moins bien rémunérés ont été parmi les plus exposés ; les écarts scolaires se sont creusés durant les confinements (d’où un plan pour le numérique éducatif afin de doter tous les élèves d’outils informatiques).

En 2022-2023, un autre choc, inflationniste celui-là, éprouve la justice sociale : l’envol des prix de l’énergie et des denrées entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les ménages. Grâce au système d’indexation automatique des salaires et allocations, propre à la Belgique, les revenus ont été partiellement ajustés à l’inflation, préservant en partie la capacité d’achat des plus modestes.

Cela a valu à la Belgique des félicitations de l’OIT pour ce stabilisateur social unique, même si les employeurs contestent son coût pour les entreprises. Pour soutenir davantage les plus fragiles, le gouvernement a accordé en 2022 un chèque énergie aux ménages à bas revenus et rehaussé temporairement les minima sociaux.

Sur le plan des droits, la période voit aussi la concrétisation de nouvelles avancées : en 2020, la Belgique interdit les discriminations liées à l’état de santé (extension de la loi anti-discrimination), en 2022 elle devient l’un des premiers pays à rendre les protections périodiques gratuites dans les écoles, et en 2023 l’euthanasie est étendue aux mineurs transgenres (sujet très débattu).

Enfin, la justice sociale en 2025 reste un thème central des débats électoraux : la question de la réforme des pensions (montant minimum porté à 1 500 € net, âge de la retraite effectif trop bas) et celle de la responsabilisation des Régions en matière de chômage (Flandre souhaitant réduire les allocations dans le temps, ce que refusent les francophones) seront au cœur des élections, témoignant d’une vision toujours en construction d’une justice sociale partagée entre tous les Belges.

Liberté des médias

Au début des années 2020, la Belgique connaît un léger recul dans les classements internationaux de liberté de la presse, passant à la 31^e place sur 180 pays en 2023 alors qu’elle figurait 23^e deux ans auparavant.

Ce tassement s’explique par les incidents de la fin de décennie précédente et par le climat général de durcissement envers les médias (menaces verbales, cyberharcèlement). Néanmoins, les fondements légaux demeurent inchangés : l’article 25 de la Constitution et la robustesse de l’État de droit garantissent l’absence de censure et la liberté d’informer.

En 2023, la Belgique a rejoint la Coalition pour la liberté des médias, initiative internationale réaffirmant l’engagement du pays en faveur d’une presse libre.

Sur le plan interne, les autorités et les rédactions travaillent de concert pour endiguer les menaces : par exemple, des protocoles entre la police et les associations de journalistes sont discutés afin d’éviter les bavures lors des manifestations, et des poursuites judiciaires ont lieu contre les auteurs de menaces graves en ligne visant des journalistes.

Par ailleurs, face au déluge informationnel du web, les médias belges investissent dans l’éducation aux médias du public (programmes de fact-checking, rubriques de décryptage) pour maintenir un débat public éclairé.

Enfin, l’écosystème médiatique s’enrichit de nouvelles voix grâce aux podcasts, web TV et médias participatifs, ce qui élargit la liberté d’expression.

Le défi de cette décennie consiste à préserver un journalisme de qualité et indépendant à l’heure de la volatilité de l’attention et des algorithmes : un défi que la Belgique relève en s’appuyant sur sa tradition de pluralisme et de respect de la liberté de la presse.

Participation citoyenne

Dans les années 2020, la participation citoyenne en Belgique continue de se réinventer, avec une intégration croissante des mécanismes participatifs au niveau institutionnel.

La Communauté germanophone (Ostbelgien) concrétise pleinement son modèle de dialogue citoyen permanent : depuis fin 2019, un Conseil citoyen de 24 membres tirés au sort est en place aux côtés du Parlement et propose régulièrement des sujets à débattre en assemblées de citoyens, faisant de cette petite entité de 80 000 habitants un laboratoire démocratique salué internationalement.

Inspirées par cet exemple, d’autres régions belges suivent : la Région de Bruxelles-Capitale organise à partir de 2021 plusieurs commissions délibératives citoyennes-parlementaires sur des thèmes variés (5G, inclusion des personnes handicapées, avenir de la démocratie locale…), et la Wallonie a inscrit dans sa déclaration de politique régionale 2019-2024 la volonté de mettre en place des jurys citoyens consultatifs (un premier panel citoyen wallon a été testé en 2021 sur la question de la ruralité).

Sur le plan électoral, une évolution notable vise à renforcer l’implication des jeunes : à partir des élections européennes de 2024, l’âge du droit de vote est abaissé à 16 ans (pour ce scrutin uniquement), ce qui permettra à plusieurs centaines de milliers d’adolescents belges de voter pour la première fois, mesure destinée à combler le fossé entre les jeunes et la politique et expérimentée suite à un accord au niveau de l’UE.

Par ailleurs, la démocratie numérique continue son essor : durant la pandémie de Covid, de nombreux débats publics se sont déplacés en ligne (consultations virtuelles, webinaires citoyens) et les conseils communaux eux-mêmes ont tenu des séances via vidéo-conférence accessibles au public, ouvrant potentiellement la voie à une participation à distance plus régulière.

Dans le même temps, des mouvements citoyens concrets persistent : fin 2021, des manifestations massives (jusqu’à 35 000 personnes) ont lieu à Bruxelles contre les restrictions sanitaires, témoignant d’un autre versant de la participation citoyenne – la contestation directe des politiques publiques – et posant la question de l’articulation entre expertise scientifique et légitimité populaire.

En 2022-2023, face à la crise énergétique, des collectifs citoyens se mobilisent pour la sobriété et l’entraide (ex : groupes locaux de partage d’énergie, revendications pour une tarification sociale élargie).

Enfin, l’éducation à la citoyenneté commence à porter ses fruits : les jeunes générations, formées au débat via les cours de citoyenneté et les réseaux sociaux, montrent un taux élevé d’engagement associatif et volontaire, qu’il s’agisse de participer à des conseils de jeunesse (tant au niveau des écoles qu’au niveau des entités fédérées) ou de s’investir dans des projets solidaires (plateformes d’aide aux réfugiés, marches pour le climat, etc.).

La participation citoyenne belge des années 2020 se caractérise ainsi par son foisonnement et son institutionnalisation progressive, dans le but de renforcer la confiance dans le système démocratique et d’impliquer plus directement les citoyens dans les décisions qui les concernent.

Séparation des pouvoirs

En cette décennie 2020, le fonctionnement démocratique belge reste confronté à la fragmentation politique et à de nouveaux défis. Les élections fédérales de mai 2019 ont de nouveau conduit à une très longue formation gouvernementale (près de 500 jours) avant qu’une coalition hétéroclite de sept partis (« Vivaldi ») ne prête serment en octobre 2020.

Entre-temps, la pandémie de Covid-19 a éclaté alors que le pays était dirigé par un gouvernement minoritaire en affaires courantes, ce qui a nécessité l’octroi de pouvoirs spéciaux temporaires pour gérer la crise – une situation exceptionnelle qui a testé l’équilibre des pouvoirs en situation d’urgence.

Si le Parlement a dans un premier temps délégué certains pouvoirs à l’exécutif pour agir vite (arrêtés ministériels de confinement, etc.), il a ensuite repris son rôle de contrôle et instauré une commission spéciale d’enquête Covid en 2021, illustrant la résilience des contre-pouvoirs.

Par ailleurs, le système consociatif belge continue d’évoluer : certaines assemblées innovantes combinant élus et citoyens se pérennisent.

À Bruxelles, les premières commissions délibératives mixtes (15 députés + 45 citoyens tirés au sort) ont lieu à partir de 2021, produisant des recommandations conjointes sur des politiques régionales. La Wallonie envisage également d’intégrer ce mécanisme après 2022.

Enfin, le débat institutionnel reste vif à l’approche des élections de 2024 : d’une part, des partis flamands plaident pour un passage à un régime confédéral (transfert quasi total des compétences aux Régions) tandis que d’autres formations défendent le maintien d’un fédéralisme solidaire.

Quelle que soit l’issue de ces débats, les principes fondamentaux de l’État de droit belge – séparation et équilibre des pouvoirs, contrôle juridictionnel et respect des minorités – sont solidement ancrés et continuent de servir de garde-fous démocratiques.

Transparence

Au début des années 2020, la Belgique poursuit et approfondit ses efforts en matière de transparence, dans un contexte où l’exemplarité des dirigeants est plus que jamais scrutée. La crise du Covid-19 (2020-2021) a paradoxalement constitué un test de transparence : le gouvernement a dû communiquer presque quotidiennement sur les mesures sanitaires, publier les avis du groupe d’experts (le GEES puis le Gems) et rendre publics les contrats de commande de vaccins sous peine de nourrir la méfiance.

Si des critiques ont émergé sur le manque de clarté de certaines décisions (comme la fermeture prolongée de certains secteurs), dans l’ensemble la gestion de crise a montré une volonté de justifier et expliquer les décisions pour maintenir l’adhésion démocratique. Côté institutionnel, de nouvelles avancées ont lieu : en 2022, la Belgique transpose la directive européenne sur la protection des lanceurs d’alerte, créant des canaux sécurisés pour signaler les fraudes ou abus dans l’administration et protégeant les whistleblowers de sanctions.

Par ailleurs, la publication proactive de données continue de s’étendre : la plateforme open data fédérale est enrichie (données sur la qualité de l’air, les dépenses publiques, etc.), et les Régions font de même (par exemple, la Flandre met en ligne ses bases de données environnementales et la Wallonie ouvre son portail Walleg).

En 2023, selon l’indice de perception de la corruption de Transparency International, la Belgique obtient un score de 73/100, la plaçant 16^e sur 180 pays, ce qui la range parmi les pays les moins corrompus au monde.

Toutefois, ce score est en légère baisse par rapport à quelques années auparavant, signe qu’aucun acquis n’est définitif.

Les défis actuels en matière de transparence incluent la régulation des pantouflages (le passage du public au privé de certains responsables) et la lutte contre la désinformation : le gouvernement a ainsi lancé en 2021 un registre de transparence des rencontres entre ministres et lobbyistes, et soutient des initiatives visant à mieux informer le public sur le financement des campagnes électorales à l’ère des réseaux sociaux.

En somme, la transparence s’est imposée en Belgique comme une composante essentielle de la gouvernance démocratique, évoluant d’une obligation légale en 1994 à une véritable culture de l’ouverture dans les années 2020.

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